Pour sa 3e édition, l’exposition des artistes récemment diplômés de l’INBA Tétouan qui s’invitent à Tanger, se déploie doublement à la galerie Kent et à l’espace culturel Cervantes. D’ores-et-déjà certifié comme le vivier artistique le plus prolifique du pays depuis les années 2000, l’INBA est représenté par un groupe de jeune artistes notamment issus de l’atelier de l’artiste Batoul S’Himi, où se mêlent pratiques de l’installation, de la performance, du dessin… Paradoxalement à leur affiliation avec l’école et le contexte pédagogique, l’exposition présente ces artistes à un stade très particulier de leur développement : tout juste diplômés donc libérés de toute obligation, en un mot prêts pour une nouvelle vie ou plutôt une « Second life » : la vie d’étudiant une fois accomplie, s’ouvrent tous les possibles (comme dans le jeu vidéo de réalité virtuelle où chacun peut imaginer sa vie « from scratch »). Tout ne fait pour eux que commencer, d’ores et-déjà immergés qu’ils/elles sont dans les problématiques de la « vie d’artiste »,
dans les choix de professionnalisation, les moyens de subsistance et de production. En un sens, l’exposition nous fait entrer dans l’intimité créatrice de jeunes espoirs, arrivés à un point de non-retour ou à la dernière escale avant de prendre définitivement l’embarcation de la vie d’artiste – avec ses jours heureux et ses épreuves qui font de tout artiste un « ouvrier », « travailleur » ou « artisan » de ses propres rêves et engagements. Ces artistes développent des savoir-faire et des imaginaires empruntant autant à l’artisanat local qu’à l’industrie mondialisée ou encore aux mondes virtuels. Mais la notion de « Working class » affichée dans le titre de l’exposition pointe également la « communauté » des artistes : ses liens de solidarité, ses moyens de se fédérer pour mieux imaginer le futur… Avec l’enjeu de continuer à représenter une force parmi les composantes de la société civile. Poser sans doute plus que jamais l’enjeu d’une citoyenneté propre aux artistes.